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Photo du rédacteurElizabeth Boccara Bright

Te demander pardon.

Dernière mise à jour : 27 sept. 2019


Il y a les placards, les étagères, les armoires. Les petits vêtements repassés, qui sentent bon la lavande, et que j'aime respirer au petit matin avant d'habiller mon petit garçon. Il y a les bocaux, les tisanes en vrac, le sirop d'érable et la fleur d'oranger qui trônent dans ma cuisine. Quelques brins de thym, un peu de gingembre déjà ridé, et toujours du chocolat pour m'apporter de la douceur lorsque la nuit, je me réveille, angoissée de la suite.


Et puis dans ma chambre, entre les bodies en dentelle et les pulls d'hiver, j'ai rangé une boite ronde, entourée d'un gros noeud de satin bleu roi. Dans cette boite, j'y ai rangé mon coeur.

Il y quelques mois. Je ne m'en servais plus beaucoup ces derniers temps. Il s'était refroidi et un peu atrophié, et dans ma poitrine, il y faisait froid. Alors, pour ne pas qu'il se cyanose et s'éteigne un matin d'hiver, j'ai décidé de l'enfouir loin, très loin, dans un tiroir.


Lorsque je me couche seule dans le lit, et si je tends bien l'oreille, je l'entends battre du fond de sa petit boite. Tadam, tadam, tadam... C'est un son lointain. Comme le son d'un écho dans la montagne quand la Lune est haut dans le ciel et que le animaux s'endorment pour laisser la Nature jouer de la musique.

Et lorsque j'entends ce battement de coeur, je me rassure, il est peut être un peu brisé, mais il bat encore. Tadam, tadam.


A ma façon, à la façon d'une humaine, je n'ai pas su t'aimer. Je n'ai pas su me servir de mon coeur avec toi, je n'ai pas su comment le faire battre à l'unisson avec le tien. Et je sais bien que nous avons contemplé ensemble tout ce que nous aurions pu être.

Nous rêvions de grands espaces, de nuit à la belle étoile dans la forêt de Brocéliande, d'amour sous les cascades d'eau des Cévennes que tu aimes tant, de brunch au bout du monde et de grasse matinée à refaire le monde dans notre lit.

A présent, je suis seule dans ce lit. Moi, et mon triste coeur rangé dans cette foutue armoire.


Parfois, je respire aussi tes vêtements. Je peux sentir l'odeur de ta peau, qui est devenue cette surface de réparation, ce cuir si dur à force de s'être endurci par le poids des mots infligés. Je sens ce parfum qui enivrait mes pensées et brouillait tout mes sens il y a encore 2ans. Je te regarde t'occuper de notre enfant. Je te vois si tendre, si amoureux de la Vie que nous avons crée ensemble, si patient et dévoué. Je détourne le regard quand parfois, tes yeux croisent les miens. Pour que jamais mes yeux ne me trahissent et que tu t'apercoives qu'ils crient de chagrin, appellent à l'aide, juste quelques mots qui pourraient consoler mon âme de notre échec. Je veux bien porter le poids de notre défaite amoureuse si cela peut te faire plaisir. Je l'accepte. Mais je sais, et tu le sais aussi, le silence, l'absence de douceur, l'extreme isolement, les mots qui ne viennent jamais à moi, et l'irruption de ceux et celles qui se mêlent et s'entre mêlent dans les noeuds de notre histoire alors qu'ils n'y ont aucunement leur place, tout cela, tu as laissé faire. Et moi, je ne laisse plus rien passer. Je défais donc ce noeud qui nous lie, et je pars.


Un jour, le soleil caressera les murs de notre salon. Notre petit garçon dansera sur ma playlist et jouera avec Poppy. Il y aura des bourgeons de fleurs dehors, et dans la cuisine, des brioches à la canelle embaumeront la cuisine. Ce jour là, et si tu le veux, tu pourras m'enlacer. Et me chuchoter à l'oreille que tu me pardonnes. Et que tu me demandes pardon à ton tour.

Juste pour sentir une derniere fois ton odeur. Celle d'un homme qui su un jour nous aimer.

Moi, et mon coeur maladroit.

Ce jour là, j'irai faire le tri dans mon armoire, et mon coeur retrouvera sa place dans ma poitrine.


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